Émile et Renée défient le temps et regardent devant
Ils totalisent 173 années de vie à eux deux. Ils ont traversé les années en faisant fi des aléas de la vie, qui ne les ont pourtant pas épargnés. Émile et Renée Garnier défient le temps et lui font un pied de nez.
Lorsqu’on les rencontre pour la première fois, leur discrétion et leur simplicité invitent à engager la conversation. Pour en savoir plus sur ce couple à qui, avec l’âge avançant, on aurait envie de ressembler.
Émile et Renée Garnier pourraient être comme beaucoup de gens que l’on croise dans la rue, invisibles. Mais non !
L’histoire de leur vie ressemble à un roman. Un roman avec plusieurs chapitres : les uns heureux, les autres plus tristes. Mais leur envie de croquer la vie a été la plus forte et leur a permis de survivre, presque dans la clandestinité, mais toujours avec la main tendue vers les autres.
LES ALÈAS DE LA VIE
C’est dans le Sud-Manche qu’ils ont vu le jour : Émile à Saint-Quentin-sur-le-Homme ; Renée, à Saint-Laurent-de-Terregatte. Non loin l’un de l’autre.
L’un a perdu son père très jeune : les contrecoups de la guerre; l’autre a dû mettre la main à la pâte pour aider un père victime d’un accident du travail. Le quotidien d’une génération qui devait avant tout aider « la » famille. Une jeunesse qui forge le caractère et donne envie d’aller plus loin.
« Mais le fait d’être toujours ensemble à l’âge que l’on a, soupire Renée, c’est le plus beau cadeau que la vie nous ai fait. »
Un fils et une petite-fille disparus trop jeunes leur ont fait relativiser les choses. Et apprécier encore plus des petits moments qui pourraient paraître anodins. « Il faut bien survivre…, sourit Émile. Mais on a failli s’écrouler. »
Des envies de devenir menuisier pour Émile et couturière pour Renée les ont incités à quitter le domicile familial pour construire leur vie. Une vie manchoise, parisienne à Enghien et un retour vers les terres normandes. Mais toujours avec l’envie d’avancer. « J’ai connu toute l’évolution de la téléphonie et les premiers centres automatiques, raconte Émile. Le mauvais entretien des lignes que je vois sur les routes maintenant me choque un peu. Nous, nous étions au service des clients ! »
« Je serai bien resté dans la région parisienne, reconnaît Émile. Mais Renée voulait revenir par ici. »
DES YEUX PLEINS DE TENDRESSE
Une question qui démange : Comment fais-tu Émile pour avoir la vitalité que tu as ? « Il mange bien… », s’empresse de répondre Renée, tout sourire. « Mais j’élimine beaucoup, renchérit Émile. Je fais du sport, de la marche, de la gym »… et de la danse. De la danse de salon, leur passion commune. Leur préférence : « Les thés dansants à Villedieu. Mais là, avec la chute de Renée et le décès d’une amie, nous avons dû réduire une pratique de plus de trente ans. »
Étonnant ce couple qui n’arrête pas de surprendre et pour qui l’âge n’est pas un obstacle. « Un peu quand même…, soupire Émile. Avant, nous faisions des randonnées de plus de 20 km. Maintenant, ça devient difficile, je commence à lâcher prise. Il faut l’accepter. »
« Je le laisse aller à la gym tout seul, je le pousse même pour qu’il y aille. Il ne veut pas me laisser seule à la maison…, s’empresse de préciser Renée. Moi je vais à la gym équilibre. Pour l’instant, les randonnées sont trop longues pour moi après ma chute. »
Pas question de rendre les armes, de s’avouer trop âgés. Non, c’est cette volonté qui, tout au long de leur vie, leur a permis de retrouver le soleil. « C’est convivial Joie et Santé, apprécie Émile. C’est sympa, ça permet de rencontrer des gens. »
Le sport conserve ? « Oh oui, confirme Renée. Ça fait trente-cinq ans que je fais de la gym. »
Même si la vie n’a pas toujours été sympa avec eux, ils la trouvent « belle ! »
Émile et Renée ne laissent pas indifférent. Il suffit de voir les yeux d’Émile lorsqu’il regarde Renée pour y apercevoir tout l’amour qui les unit. Le besoin de se protéger l’un et l’autre. Le besoin l’un de l’autre. « Avec l’âge, on pense plus à l’autre », reconnaît Émile.
Un conseil aux jeunes générations ? « Partez, voyagez… Allez voir ailleurs ce qui se passe. » Éternel optimiste Monsieur Émile : « Il faut vivre avec le futur. »
Ils sont beaux ces deux-là !
Philippe LAISNÉ.